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Des produits cancérogènes en milieu de travail… une réalité à intégrer dans les plan de prévention des risques

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Il n’est pas rare que des salariés déclarent aimer les ambiances physiques distinctives de leur milieu de travail ; il en est même qui les regrettent quand matériaux ou agents ont été remplacés par des produits organiques du fait des effets de leur toxicité immédiate ou différée: les odeurs des matières premières, des vapeurs et diverses émanations de solvants dans l’imprimerie, la tannerie, la menuiserie, etc. Dans cette entreprise, la direction décide de prendre en considération, et à leur juste niveau de gravité, les effets cancérogènes de ces produits et de les intégrer dans la politique de prévention des risques. Avec une implication des différents fournisseurs…

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Qui ? 

Cette entreprise familiale créée en 1960 fabrique des bateaux de 9 m à 50 m de long, destinés soit à la plaisance (yacht de luxe), soit à des usages « militaires » tels que la surveillance des côtes et le sauvetage en mer.

L’entreprise est pionnière dans l’utilisation des matériaux composites où elle a développé un très grand savoir-faire ainsi que des avancées technologiques. Elle fabrique et assemble la quasi-totalité des pièces grâce à la présence de nombreux corps de métier : composite, chaudronnerie, mécanique, hydraulique, accastillage, menuiserie, ébénisterie, marqueterie, plomberie, électricité, sellerie, etc.

Chaque bateau est unique et nécessite une conception spécifique. Les processus de fabrication sont donc quasi exclusivement « manuels » et ne permettent que peu d’aide mécanique ou d’automatisation.

Face à des difficultés économiques, l’entreprise a fait l’objet de trois rachats successifs en 15 ans et reste fragile. La démarche de prévention est principalement portée par le responsable sécurité qualité. Une infirmière est également employée à temps partiel.

Quel était le problème à régler ?  

La nouvelle direction, issue du monde de l’industrie, souhaite impulser une dynamique sécurité, en particulier vis-à-vis de l’exposition aux produits CMR (Cancérigènes Mutagènes Reprotoxiques). Elle constate que « le CHSCT voit les risques flagrants comme les chutes, les risques mécaniques mais pas ceux dont les effets sont différés dans le temps ». Elle rencontre des difficultés à agir dans ce domaine : « Impossible de retirer l’acétone à Mme X qui est pourtant secrétaire du CHSCT », « idem avec les poussières de bois chez les menuisiers qui sont fiers que ça sente bon chez eux ».

L'Aract propose donc à l’entreprise de travailler sur sa démarche de prévention des risques chimiques et CMR. Cette action se déroule dans le cadre d’une recherche action sur "le processus de construction sociale de la prévention du risque CMR en entreprise" réalisée par deux universités bordelaises, des Aract et l’Anact dans plusieurs entreprises.

Qu’ont-ils fait ?  

Dans un premier temps l'Aract a validé avec la direction et le CHSCT leur engagement à s’impliquer dans la construction de la démarche de prévention, et en premier lieu celle du risque CMR. Ensuite nous nous sommes assurés que la méthodologie et les objectifs du projet de recherche action permettaient certes d'apporter de la connaissance sur le processus de construction sociale de la prévention, mais aussi de faire progresser l’entreprise sur la prise en compte du risque CMR et mettre en place des solutions de prévention.



L'Aract a exploré l'organisation de la prévention dans l'entreprise. La première phase a permis d'identifier les acteurs dans l'entreprise et les ressources externes déjà sollicités ou non. Nous avons reçu en entretiens individuels et collectifs les personnes en charge de la prévention, les membres du CHSCT, la direction, l’encadrement intermédiaire et des salariés. L'objectif était de faire un état des lieux sur l'organisation de la prévention dans leur entreprise et sur leurs connaissances des risques en général, puis de manière spécifique sur leurs éventuelles expositions au CMR, sur les effets sur la santé, etc.

Quelles sont les personnes au sein de l'entreprise qui connaissent ou pas le risque CMR, les effets sur la santé, les conditions d'exposition, les mesures de protection ? Auprès de qui, chacun à son niveau, direction, DP, opérateurs d'atelier, peuvent-ils aller chercher de l'information sur les CMR à l'intérieur et à l'extérieur de l'entreprise ? Voilà des exemples d'investigations que nous avons menées par entretien. L’utilisation d’un plan du site (qui comporte de nombreux bâtiments) a facilité la localisation des différents types de risques pour les salariés interviewés.



D'autre part, des observations globales du travail nous ont permis de repérer les conditions d'exposition aux risques CMR, de les mettre en lien avec leur activité de travail et leur représentation du risque et de la prévention. À partir des observations globales et avec les différents acteurs internes et externes, nous allons cibler les situations de travail en fonction de la fréquence d’exposition pour les opérateurs, des moyens de protection utilisés, des pratiques particulières repérées…



Cet état des lieux a permis de relever deux éléments importants pour la construction sociale de la prévention :

• Le premier étant que le niveau de connaissance et d’information à propos des risques CMR et de ses conséquences sur la santé est très différent entre la direction sensibilisée par son expérience précédente, le responsable sécurité, les membres du CHSCT, les salariés directement concernés et les salariés des services commerciaux et administratif non directement concernés. • Le second étant que la prévention sur les CMR nécessite d’avoir des relais à travers des personnes ressources spécifiquement sur ce risque.



Toutefois, il convient de préciser qu'une entreprise peut être en conformité avec les obligations légales en vigueur et pour autant avoir des difficultés à construire sa prévention des CMR. Par exemple, dans un premier temps ne sont repérés dans l’entreprise que les produits CMR entrants. Ceux issus du process de fabrication comme le chrome 6 dû à la soudure sur inox sont inconnus. La question de la substitution des CMR est traitée avec les fournisseurs et à partir de connaissances issues de la veille (internet) du responsable sécurité.

Pour quels effets ?  

La mobilisation d’autres acteurs extérieurs devrait permettre d’enrichir la réflexion sur cette prévention. D’autre part à ce stade l’entreprise prend conscience de la nécessité de construire en interne pour que les salariés y adhèrent.

L'action en entreprise est toujours en cours de réalisation. Le fait de réaliser l'état des lieux des connaissances sur les CMR dynamise la construction sociale dans l'entreprise et permet de dépasser la simple conformité à la loi pour construire une prévention efficace. L’entreprise monte en compétence avec l’appui et l’expertise des personnes ressources externes sur ce risque CMR.

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